À la suite des conférences Chalmers et de politique nationale de mars 2006, le Conseil d'administration de la Conférence canadienne des arts (CCA) a établi une liste de priorités d'action politique à court, moyen et long terme afin de guider les activités de son Secrétariat. Il est entendu que si les priorités à court terme requièrent l'attention immédiate et la part du lion des ressources de la CCA, elles peuvent également devenir des priorités à moyen ou long terme, dépendant du succès à les atteindre. Par ailleurs, il est évident que les priorités à moyen et long terme doivent recevoir un certain degré d'attention dès maintenant si on veut en voir la réalisation un jour. Il est également entendu que ces priorités de la CCA devront peut-être être ajustées de temps à autre pour tenir compte d'événements politiques et de changements dans les divers dossiers sur lesquels la CCA n'a aucun contrôle.
Priorités d'action politique à court terme (de 6 à 8 mois)Cette première liste de priorités doit retenir l'attention et l'action immédiate de la CCA, dans le contexte d'un agenda politique et réglementaire qui échappe cependant à son contrôle. Ces priorités à court terme seront maintenues jusqu'à ce que les résultats recherchés aient été atteints ou que la CCA ait décidé de les abandonner après consultation auprès de ses membres.
- Un financement accru et stable : Un financement accru et stable du gouvernement fédéral dans le domaine des arts et de la culture constitue la plus haute priorité de la CCA. Ceci inclut un accroissement substantiel et stable du budget du Conseil des arts du Canada, un financement adéquat des activités des artistes et organisations sur la scène internationale et des ressources suffisantes pour les divers programmes et agences afférentes au ministère du Patrimoine, notamment mais non exclusivement, pour la Société Radio-Canada et Téléfilm.
La CCA appuie également les efforts de l'Association des musées canadiens afin que soit finalement adoptée la nouvelle politique muséale, avec les accroissements budgétaires nécessaires à sa mise en application. La CCA va continuer d'appuyer l'AMC dans les efforts qu'elle déploie pour l'atteinte de cet objectif.
- Un traitement équitable pour les artistes et les arts : Un traitement juste et équitable pour les artistes et créateurs est au coeur même de la quête pour le Statut de l'artiste, une revendication de longue date du milieu culturel en général et de la CCA en particulier. En premier lieu des préoccupations à ce chapitre, on trouve les questions de taxation : exemption de l'impôt des revenus de droits d'auteur, étalement du revenu des artistes sur plusieurs années d'imposition et l'exemption de l'impôt des bourses attribuées aux artistes et créateurs. D'autres sujets qui nécessitent une attention à moyen et long terme concerne la protection contre la faillite; des avantages sociaux concernant santé et sécurité; le statut de travailleur indépendant; des politiques d'approvisionnement équitables et la reconnaissance de certains droits collectifs. La CCA s'engage à promouvoir l'adoption de programmes et de lois provinciales visant au traitement équitable des artistes : un des objectifs à moyen terme concernant ce dossier porte sur le développement d'outils de recherche et d'intervention favorisant la progression du dossier au sein des différentes juridictions provinciales. À très court terme, la CCA poursuivra l'objectif de faire étendre aux activités de formation dans les diverses disciplines artistiques le crédit d'impôt récemment promis par le gouvernement fédéral pour les parents d'enfants de moins de 16 ans inscrits dans des activités sportives reconnues.
- Le contenu culturel canadien et la réglementation sur la propriété étrangère : Le maintien des politiques de réglementation des industries culturelles canadiennes sera plus que vraisemblablement à l'ordre du jour durant la période visée. On s'attend à ce que les négociations de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) concernant l'Accord général sur le commerce des services (AGCS) contestent sérieusement la réglementation canadienne actuelle sur la propriété des entreprises dans le secteur audio-visuel de même que sur l'offre et l'appui à la création de produits culturels canadiens.
L'intégrité du système actuel sera d'autant plus mise à l'épreuve si l'on considère la revue que le gouvernement entend faire du secteur des télécommunications et de la radiodiffusion, à laquelle il faut ajouter également la révision du mandat de la Société Radio-Canada et du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC). D'autres régimes réglementaires, comme ceux s'appliquant à l'édition et à la musique, pourraient tout aussi bien être remis en question.
- Diversité culturelle : Cette priorité d'action a deux volets principaux: premièrement, la promotion de la diversité culturelle à l'échelle internationale et l'évaluation de l'impact des négociations sur le commerce international sur cette diversité tant au pays qu'à l'étranger; deuxièmement, la reconnaissance et l'implication des diverses communautés culturelles dans la vie des arts et des activités culturelles au pays en général et dans les activités de la CCA en particulier.
Une des premières préoccupations de la CCA au chapitre de la diversité culturelle vise la ratification de la Convention sur la diversité culturelle adoptée par l'UNESCO en 2005 et l'impact des traités commerciaux internationaux sur la culture. La CCA va inciter le gouvernement canadien à maintenir le rôle de chef de file que la Canada a joué sur la scène internationale dans ce dossier au cours des dix dernières années. La CCA va entre autres appuyer pleinement le travail de la Coalition pour la diversité culturelle (CDC) et du Réseau international sur la diversité culturelle (RIDC), en plus d'intervenir directement s'il y a lieu dans les processus de l'UNESCO dans ce dossier.
La CCA s'engage à tenir informés ses membres et toutes les parties prenantes au débat sur l'impact des accords internationaux sur le commerce sur le secteur culturel canadien et sur la diversité culturelle à l'échelle mondiale.
Au plan domestique, la CCA développera une série d'initiatives ayant pour but d'inclure les diverses communautés culturelles dans les débats concernant les politiques et programmes culturels canadiens. (Voir les priorités à long terme ci-après)
- Préparation électorale : Le 39ème Parlement du Canada a résulté dans l'élection d'un gouvernement minoritaire dont l'existence pourrait être relativement précaire. Au cours des prochains mois, la CCA doit donc être prête à faire face à tout moment au déclenchement d'une élection fédérale. Les enjeux fondamentaux pour les arts et la culture doivent figurer au chapitre des préoccupations électorales des partis politiques de façon globale et significative à la fois. Il est donc essentiel de procéder à la mise en place d'une stratégie de mobilisation du milieu et à la production d'instruments susceptibles d'aider nos membres à inscrire arts et culture à l'agenda politique de cette prochaine élection
Priorités d'action politique à moyen terme (de 8 à 18 mois)
Il importe de prêter dès maintenant une certaine attention à cette seconde liste de priorités, mais dans le cadre d'une action à plus long terme et, encore une fois, sujet aux réalités d'un agenda politique que la CCA ne contrôle pas. Comme les priorités à court terme, ces priorités à moyen terme seront poursuivies jusqu'à l'atteinte des résultats recherchés ou jusqu'à ce que la CCA décide, après consultation avec ses membres, de les abandonner.
- Les arts, la culture et la politique internationale : Il est probable que la définition de la politique internationale canadienne fera l'objet d'études et de débats durant la durée de vie de ce 39ème Parlement. Les propositions déposées par le précédent gouvernement au printemps de 2005 éliminaient la promotion des valeurs et de la culture canadienne comme troisième pilier de notre politique étrangère, tout en se référant à un concept dilué de "diplomatie publique". La CCA entend engager le dialogue avec le Ministère des affaires étrangères et avec le Comité permanent de la Chambre en cette matière afin d'assurer le retour de ce troisième pilier de notre présence sur la scène internationale.
- Suivre l'agenda législatif du nouveau gouvernement :Il est évident que les activités parlementaires et gouvernementales vont soulever à moyen terme des questions d'intérêt crucial pour le secteur culturel. Des amendements à la loi du droit d'auteur sont attendus et il se peut que le gouvernement dépose des amendements au Code pénal pouvant mener à la criminalisation de certaines activités créatrices. Les provisions de la nouvelle loi sur la responsabilité fédérale risquent par ailleurs d'accroà®tre le fardeau bureaucratique sous lequel ploient déjà bon nombre d'organisations culturelles comme la CCA. Bref, tous ces changements peuvent affecter les arts et la culture et la CCA se doit d'être vigilants à leur égard et d'intervenir de façon appropriée.
- Reformuler l'argumentaire et la stratégie de promotion du secteur culturel au Canada : Une reformulation des arguments et de la stratégie de défense et de promotion du secteur culturel est évidemment une priorité de grande importance, mais c'en est une qui va nécessiter un investissement considérable de temps et d'énergie et une grande rigueur intellectuelle. Il n'en reste pas moins que c'est là une priorité d'action identifiée sans ambiguïté par les participants aux conférences de mars dernier.
À la base de cette reformulation, on trouve le concept de "Citoyenneté culturelle" ainsi que la recherche d'une nouvelle façon de présenter les éléments traditionnellement associés au "Statut de l'artiste" et d'affirmer le rôle des arts et de la culture au sein de la société canadienne.
La CCA est par ailleurs déterminée à étendre ses réseaux de contacts dans la société civile, à la fois pour accroà®tre la compréhension de la population des contributions du secteur culturel et pour accorder, chaque fois que possible, un appui aux organisations qui oeuvrent pour le bien commun. Le développement réfléchi d'une approche stratégique à ces fins se doit d'être une des priorités à long terme de l'organisation.
- Développer un cadre cohérent pour les divers éléments de la politique culturelle canadienne : Les membres de la CCA ont également invité la CCA à développer un encadrement général cohérent pour l'ensemble de ce qui constitue de facto la politique culturelle du pays. L'intention ici est de trouver une alternative à l'ancien objectif d'une loi-cadre fédérale sur la culture. En principe, cette initiative devrait découler des travaux reliés à la priorité précédente. Elle implique l'exploration du concept d'une Charte canadienne de principes culturels qui pourrait servir de référence à toute politique ou décision administrative ou réglementaire affectant les artistes ou institutions culturelles au Canada.
Priorités d'action politique à long terme (18 mois et plus)
Il est essentiel de travailler immédiatement sur ces priorités, mais avec une vision à beaucoup plus long terme.
- Impliquer les jeunes : La génération de baby-boomers qui peuple actuellement le secteur culturel et qui a tant contribué à la création de nos institutions approche de la retraite, une réalité qui fait de la planification de la relève un besoin urgent. La CCA entend travailler de concert avec le Conseil des ressources humaines du secteur culturel (CRHSC) dans ce dossier. À l'interne, la CCA étudiera la possibilité de créer un comité consultatif des jeunes chargé de suggérer des façons d'impliquer la jeune génération des leaders du secteur culturel de demain. Finalement, la CCA continuera d'oeuvrer dans le secteur "arts et éducation" par le biais des travaux de son comité du même nom et la tenue de discussions stratégiques avec des partenaires à l'échelle nationale.
- Promouvoir la diversité culturelle au pays : La CCA se doit de développer une approche lui permettant d'étendre son membership au sein des groupes culturels autochtones et ceux des diverses communautés au pays, ceci afin de mieux refléter et promouvoir les enjeux culturels découlant des réalités démographiques nationales. La CCA établira de nouveaux partenariats afin de faire de ces communautés des participants à part entière dans les débats publics entourant les enjeux culturels. Compte tenu des changements au sein de la population canadienne, la CCA doit faire de cet engagement d'inclusion de la jeunesse et des communautés culturelles une priorite à long terme si elle veut remplir sa mission de façon démocratique et équitable.
- Développer un programme national de formation en relations gouvernmentales : Dans le cadre d'un programme de développement des ressources humaines du secteur, la CCA créera un programme de formation professionnelle en relations gouvernementales destiné aux jeunes qui oeuvrent au sein des organisations culturelles de service. Ce programme s'articulera autour de séminaires présentés localement par des employé(e) experts de la CCA et portant sur les relations gouvernementales et la politique culturelle fédérale.
- Promouvoir l'adoption d'un cadre cohérent pour les divers éléments constituant la politique culturelle canadienne : La CCA verra à développer un plan d'action utilisant à bon escient le "réseau de réseaux" qu'elle constitue, afin de promouvoir l'adoption par le Parlement de la Charte canadienne des principes culturels qu'elle aura développée et qui puisse servir de pierre de touche pour toute législation ou réglementation concernant les artistes et le secteur culturel. Cette Charte devrait inclure les moyens légaux de faire modifier toute législation ou décision administrative contraire aux principes énoncés.